Gaël Cadiou

NON STOP

Le lac, noir, fait miroiter des rues menaçantes et un regard fixe dans le métro devient porteur d’angoisses, le bruit des pas dans le dos devient attaque. Tourbillon de polars et de films d’horreur, la tasse de café sur le bureau de l’enquêteur, du rouge à lèvre sur sa chemise et le lac fait remonter les agitations. Ecrasement par questions, étouffement de peur, palpitations et sueurs.

L’injustice des réflexions et des remarques sans fond bat son plein et la peur d’être confondue avec la noirceur écrase le cœur. Réouverture du dossier épais et sans fin. Sauve qui peut, la vie, je rajoute une pointe de gris par petite touche pour arriver progressivement au noir et blanc.

Les nuages d’un ciel chargé avant la tempête.

Elle entre dans la maison.

Le lac frissonne, la claque soulève la figure, part soudainement, révélation d’un profond, d’une activité volcanique insoupçonnée gardée sous une calotte glacière. Où se trouve le lac ? Près de la famille des geysers.

Bruits des bouillonnements.

Le rose bonheur et la vie joyeuse existent avec le feu aux joues et le froid aux pieds. Le corps féminin refait surface, blanc et lucide. Les mots noyés refont surface par sanglots, l’étouffement dans la gorge et les yeux humides puis le ventre, d’instinct se gonfle. La vérité physique du corps, la présence ineffaçable, la résistance à l’intolérance.

Le goût du sel des larmes et la gorge serrée empêchant presque la phrase de se terminer. Secousses de vie et étranglement.

Les herbes brûlées par la lumière et pliées au vent, les landes, le vent, la lumière sombre et la mer tapant les rochers, le sang battant aux tempes et les cheveux en herbes folles. Les algues roses et le scintillement du sable charrie un concentré d’ombres portées qui s’enchainent successivement, plein de noirceur et de recoins grouillants de bouches à venins, d’yeux brillants d’une troupe de soldats ennemis morts-vivants, de mères amazones impitoyables et manipulatrices de destins et de criminels violeurs. Méduse et son regard de terreur, bouclier et flèches virtuelles, réseaux sociaux et odyssée, les flots des histoires sans dialogues et des imaginations sans mots, l’appel des sirènes sans queue ni tête. Poséidon, la barbe bouclée et la lance perçant les flots, rappelle la vie en ville d’ Ys et Dahu trompée, punie par son père. La bataille épuisante contre les situations à pièges et les interrogatoires des discussions à tiroirs méprisants. Je n’ai plus envie avant d’oser, avant même d’avoir exprimé, fatiguée par la tempête de mes chimères. La clé de ma ville engloutie. Élan retenu, désir et joie ravalés avant même d’être exprimés devant le mépris inscrit sur le visage de l’autre. La retenue douloureuse et la colère serrant la gorge, pleurer pour la petite fille que l’on a forcé à pleurer pour les autres. La surface du lac est lisse et quelques larmes viennent y faire une ronde.

La barque se détache lentement du ponton.
Lien défait

 

Les images les plus claires sont les vues les plus noires, et les plus nettes les moins précises. Elles sont sans histoires mais avec les combats les plus durs.

Le silence agité avant la pluie.

La rose fanée et flétrie et les repousses de la tige.

On ne parle jamais des épines de la rose pourtant elles sont bien là pour quelque chose.

La pluie sur le visage, les cheveux aux gouttes à goutte, l’entrée dans un café et l’humidité automnale.

Images réversibles et envisageables toujours autrement, les ourlets infinis d’un poème surréaliste.

Les reflets dorés et les tons fauves de la ville se cadrent dans tous les angles possibles.

Perdue, dans le noir, c’est là que se trouve la lumière d’un mot, l’eau au fond du sable, l’oasis de bien-être se recueille et la sécheresse n’est plus que mirage. Le cercle s’ouvre en spirale, le tourbillon se termine sur la vue d’un lavabo qui se vide. La main maternelle douce relevant les cheveux, l’eau coulant en flèches de sensations dans le dos.

Il n’y avait pas de couteau dans la salle de bain. La tempête est dans ta tête

Gaël

TEXTE
WALKING LIKE GROUCHO